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Société


Chefferie coutumière: Le Mogho Naaba et l’anachronisme des mythes

Les chefs coutumiers sont les garants de la tradition. Incarnation des valeurs ancestrales, ils sont les derniers recours dans la chaîne de résolution des conflits. La parole du chef est sacrée dit-on, d’où son infaillibilité. Celle-ci se délivre généralement suivant une procédure garante de l’infaillibilité du chef. Mais aujourd’hui, les choses ne sont plus ce qu’elles étaient. Le cas du Mogho l’atteste bien. 

 


Au Burkina Faso, il est plus facile de voir le Mogho Naaba que le président Blaise Compaoré. Au Ghana par contre, il est plus difficile de voir le chef coutumier que le président. La dernière exposition publique du Mogho Naaba remonte au 18 janvier 2013 à l’occasion de la rentrée télévisuelle dont il a été le parrain. Ce n’est pas en soi un mal mais c’est un mythe qui s’en va avec ses sorties de plus en plus fréquentes dans l’espace public. On l’a vu pendant les mutineries de 2011où à partir du palais présidentiel de Kosyam il invitait les différents acteurs à la retenue.  Une sortie sans succès puisqu’il  a fallu mater les militaires. De la même manière, le Mogho naaba est intervenu dans le cadre de la lutte contre les mutilations génitales féminines. En sa qualité de leader d’opinion, on s’attendait à ce que son intervention change la donne radicalement. Là encore, les choses ne sont pas aussi simples, puisque la pratique se poursuit en particulier sur le plateau mossi. Idem en ce qui concerne la campagne conte contre l’exclusion sociale des femmes où les résultats, là encore restent très modestes. En 2009, il s’était joint à la commission épiscopale « justice et paix » pour demander la fin de ces pratiques. « Le monde évolue et en tant que gardien des valeurs ancestrales, nous ne saurons encourager de telles pratiques » avait-il déclaré aux autres chefs coutumiers et aux populations en mars 2010 à l’occasion de la marche contre l’exclusion sociale et les violences faites aux femmes. Mais force est de constater que ces pratiques demeurent toujours. En se jetant à l’eau, le Mogho naaba fait sans doute œuvre utile mais cela n’est pas sans conséquence sur l’image que l’on se fait de lui et les risques de perte de crédibilité. On peut se demander quel intérêt  pour le Mogho naaba de s’exposer comme dans le cas de la cérémonie de remise officielle du prix Miss étalon ? Disons que, quand un gardien de la sagesse s’expose publiquement dans des événements mondains, il finit par être considéré comme un politicien par l’opinion publique  et son crédit de confiance ne pourra que baisser.  

Autre exemple. , c’est le fait que le souverain s’exprime sans intermédiaire. En la  matière pourtant, Amadou Kourouma a prévenu : « En Afrique un chef parle par l’intermédiaire de son griot. S’il se trompe, il peut revenir en arrière en faisant comprendre que c’est le griot qui s’est trompé. »  C’est pourquoi on dit qu’un «  chef ne se trompe pas ». S’il  lui arrive de se tromper, il peut toujours l’imputer au griot. Alors que si le chef s’exprime sans intermédiaire, il ne peut plus revenir sur ses paroles.


28/01/2013
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