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Spécial 13 décembre 2012


Norbert Zongo: Le temps passe, l'injustice demeure!

13 décembre 1998 – 13 décembre 2012 ! Cela fait 14 ans que « le temps passe et l’injuste demeure » sur l’assassinat de Norbert Zongo et ses trois (3) compagnons d’infortunes. La commémoration du 14e anniversaire de ce quadruple meurtre a été marquée par diverses activités à Ouagadougou. Du recueillement sur la tombe au cimetière municipal du 6e  arrondissement à Goughin suivi d’un meeting à la bourse du travail de Ouagadougou. Une soirée artistique la nuit du 13 décembre à l’Atelier Théâtre  burkinabè (ATB) enrichie par des débats animés par Shérif Sy (Bendré), Newton Ahmed Barry (L’Evénement) et Rémi Dandjinou (Canal 3). Une conférence sur le thème : « Qui était Norbert Zongo ? » le 14 décembre a permis de savoir davantage sur l’homme. Deux particularités pour cette année : des bourses d’études octroyées à des étudiants (Noëllie Sawadogo, Gaston Sawadogo en Communication et journalisme à et Ahoussétou Traoré en droit, tous de l’Université de Ouagadougou). Le 20 décembre 2012, la journée inoubliable avec le marquage du lieu du crime à Sapouy

 

 

« Le peuple ne fera jamais la paix avec l’impunité »

 

«Pour que justice soit rendue, gloire est à vous le Père, le Fils et le Saint Esprit » C’est la substance de la prière qui a précédé le dépôt des gerbes de fleurs sur la tombe de Norbert Zongo et de ses trois compagnons d’infortunes le 13 décembre 2012 au cimetière municipal du 6e  arrondissement à Goughin. Au cours de cette cérémonie, le président de l’Association des Journalistes Burkinabè, Jean Claude Méda a livré un message lu par Guézouma Sanogo. « Aujourd’hui, 14 ans après, nous sommes là par devoir de mémoire et en témoignage de notre engagement et de notre persévérance dans la poursuite de la lutte pour la lumière et la justice sur le dossier Norbert Zongo et de ses compagnons » a dit le président de l’AJB. La mobilisation au cimetière n’était pas négligeable le 13 décembre dernier. Et cela peut-être pour une raison : « ils sont convaincus (les militants et sympathisants du pays réels) qu’avec la mobilisation, la justice finira par être faite sur ce dossier » « Un dossier qui depuis 6 ans (juillet 2006), des magistrats aux ordres tentent d’enterrer (…) en le déposant au Greffe du Tribunal de Ouagadougou ». Parlant de « Magistrats aux ordres » ou encore de « juges acquis » c’est la honte personnifiée au Burkina aux yeux du collectif. D’où les slogans lors du meeting (après le cimetière, le collectif a animé un meeting à la Bourse de travail de Ouagadougou) : « Procureurs pourris, juges pourris, à bas ». Quatorze ans (14) après, « la flamme de la lutte contre l’impunité reste allumée » Le peuple de son coté « n’a pas fait et ne fera jamais la paix avec l’impunité » Raison pour laquelle, le président du collectif, Chrysogone Zougmoré, a fait cet appel au peuple : « Poursuivons inlassablement la mobilisation (…) pour la défense des droits démocratiques et sociaux, la lutte contre la vie chère, l’impunité, la corruption et pour les libertés » Seul la lutte paie dit-on. Mais il faut dire que les jeunes contestent aujourd’hui la manière dont est commémoré depuis un certain temps, le quadruple assassinat de Sapouy. « Les anciens nous ont trahis »  disent-ils (lire article : « Les doyens ont trahi les jeunes »)

Basidou KINDA

 

 

La justice n'a pas bonne presse dans cette affaire

 

 

Affaire Norbert Zongo

«Les doyens ont trahi les jeunes »

«Si vous n’êtes pas fatigué du collectif, moi je suis fatigué du collectif »  Parole de Sams’K Le Dja qui dit l’assumée en ces termes : « J’ai appris à faire des ennemis tant que c’est pour dire la vérité » Ces propos sont soutenues dans une certaine mesure par Shérif Sy. « Il y a eu une faillite directionnelle » au niveau du collectif. « Les doyens ont trahi les jeunes » a dit un intervenant. Un documentaire sur l’action des jeunes à travers les manifestations réprimées des étudiants laisse abasourdi. Certains étudiants sont sortis des ces luttes anéantis car ayant tout perdu sur le plan académique. Ce qui a fait dire que « les jeunes ont payé le plus lourd tribu » de cette quête de justice pour Norbert Zongo. Un des intervenants, Rémi Dandjinou a même fait comprendre que c’est ce qui l’a poussé a jeté l’éponge et de claquer la porte du syndicat des travailleurs de l’éducation et de la recherche devenu aujourd’hui F-Synter (F signifiant Fédération). « J’ai dit à Barro (président de la F-Synter) qu’à l’allure où vont les choses on risque de conduire nos élèves au mur. Ce qui s’est avéré et j’ai quitté »  La jeunesse reste malgré tout « la partie saine » de la lutte. Leur détermination était manifeste au cours de la soirée. « Le plus grand hommage qu’on peut rendre à un martyr, c’est de lui rendre Justice » a laissé entendre l’artiste Valian. Parolier, il ajoute « Norbert n’est plus là pour jouir du droit à la vie. Mais permettons lui de jouir du droit à la vie justice ». Des propos qui ont reçu l’assentiment de l’assistance à travers de acclamations et des cris. « Le temps passe, l’injustice demeure ! » dit le spot sur la commémoration du 14e anniversaire. Cela sous-entend que la justice n’est pas juste. C’est dans cet esprit que Deris a esquissé un portrait géant de Norbert Zongo.  Là-dessus on peut lire : « Honte à la justice burkinabè » Sams’k Le Dja a fait une lecture  de certains éditoriaux de journaliste disparu dont on retient ce passage «Le monde s’humanise. Le dictateur Pinochet du Chili a perdu son immunité diplomatique. On ne peut pas torturer et tuer ainsi…Les commentateurs tirent rapidement cette conclusion : ‘’ La leçon de Pinochet servira à tous les dictateurs du monde entier !’’ Au Burkina, nous ne parlons pas de dirigeants dictateurs parce que tout simplement nous avons affaire à des gens qui hurlent leur démocratie à la face du monde… » Smockey a métamorphosé l’événement en improvisant cet air «Dis-moi qu’ils vont payer pour ce crime». La salle est en ébullition.

Basidou KINDA

 

 

Qui était Norbert Zongo ?

Thème de la conférence animée par Germain Bitiou Nama, Justin Coulibaly  et Me Farama au Centre national de presse Norbert Zongo (CPN/NZ)

«A quoi sert un héros, surtout mort ? » Interroge ainsi Me Farama. « Il sert de références, de fable pour les générations » dit-il. Norbert est pour lui, « un héros de son vivant et plus à sa mort » Beaucoup de personnes l’on connu journaliste. Mais « Il n’était pas un simple journaliste. Il avait la capacité d’indigner, de soulever l’indignation au sein des populations. Ce qui faisait peur au pouvoir (en place) » selon Germain Bitiou Nama. Pour Me Farama, Norbert Zongo est « l’incarnation du combattant de la liberté et de la justice » Mais en réalité Norbert Zongo était « un homme complexe qui s’est construit dur » selon Germain Nama. Il était en effet, journaliste, éducateur et écrivain. Educateur, « il s’est battu améliorer les conditions des enseignants » Journaliste, il a laissé une empreinte indélébile au niveau du Synatic. A travers son journal, L’Indépendant qui « était devenu une véritable institution » l’homme a voulu toucher le maximum de personnes, la masse. Henri Sebgo, de son nom de plume, a été un « franc-tireur » (sniper) qui avait le souci d’inscrire son combat dans le sens de l’histoire. Le journaliste est-il un pion du pouvoir ? Beaucoup de langues l’ont pensé ainsi. Norbert, l’anarchiste, comme on l’appelait aussi, a été taxé de communiste. «Il savait ce qu’il faisait et n’avait (d’ailleurs) pas de parti politique » a dit Germain Nama

Norbert Zongo a eu un impact sur la jeunesse. Me Farama ne dit pas le contraire. « Ma carrière a été rythmée par Norbert Zongo » a-t-il dit. Il ne l’a connu que pendant son enquête sur la mort de David Ouédraogo. C’est là que qu’il que ce dernier et autres « ont été bastonnés et cuits comme un méchoui (mouton entier que l'on fait cuire à la broche) » L’homme « était d’abord l’ami des jeunes » témoigne M. Nama. De ce fait, il avait eu un « impact endormi » sur la jeunesse. « En l’assassinant, ils ont éveillé cet impact endormi » dit Me Farama. Les manifestations des étudiants sont illustratives. Aujourd’hui, le jeune avocat (stagiaire à l’époque) garde de Norbert Zongo trois (3) aspects. Pour lui, Henri Sebgo à lui seul représentait une grande part de la société civile. Il était le défenseur de la veuve et de l’orphelin. Et comme anecdote, dit Me Farama, « il arrivait de l’avoir comme avocat » plutôt qu’une coalition d’avocats. Le seul journaliste à pouvoir faire radier des    avocats du barreau (cercle fermé et solidaire de ce corps). Une chose est sûre, « Norbert a bouleversé notre pays » a dit Dr Tall

Basidou KINDA

 

 

 

Assassinat de Norbert Zongo

Le lieu du crime immortalisé à Sapouy

 

Le marquage du lieu est un signe de la victoire du peuple en quête de justice dans un pays où on parle de « rectification ». C'est-à-dire la transition des régimes d’exception à celui de la démocratie. Paradoxe : le crime le plus odieux est commis sous ce régime.

 

 

20 décembre 2012 à 11h 15mn le Centre national de presse Norbert Zongo (CNP-NZ) en collaboration avec Semfilms et ses partenaires, ont procédé au marquage du lieu du drame avec une plaque à l’effigie du regretté. C’est donc une date historique aussi bien pour les assoiffés de la justice burkinabè mais également pour les bourreaux de Norbert Zongo. « Plus personne ne passera en ces lieux sans remarquer ou se souvenir du 13 décembre 1998! » pour citer Abdoulaye Diallo du CNP/NZ. On peut lire sur la plaque : «Norbert Zongo. Ici est tombé ce grand journaliste d’investigation, le 13 décembre 1998 » Pour imager la puissance de ses écrits, c’est une plume qui crache du sang.

L’émotion était grande tant des yeux larmoyaient. Le rêve est devenu une réalité. « Nous venons d’écrire un paragraphe de cette histoire douloureuse afin de montrer aux bourreaux de Norbert Zongo que jamais nous n’oublierons ce crime d’une telle horreur»  a dit Jean Claude Méda, président de l’Association des journalistes du Burkina (AJB), prenant la parole au nom du comité du pilotage du CNP-NZ. En 2000, en effet, pour première tentative, le convoi qui venait de Ouagadougou et conduit par Me Halidou Ouédraogo a été bloqué par les forces de l’ordre à 5 km de Sapouy.  Le marquage du lieu du drame est donc « un sentiment que les choses ont bougé. On voit aujourd’hui le lieu où ce grand journaliste, reporter a été assassiné » a dit le rappeur Smockey. Pour ce dernier depuis ce jour de haine c'est-à-dire le 13 décembre 1998, Norbert Zongo est devenu immortel et le peuple burkinabè dans son ensemble finira par avoir raison de la vie sur la mort. « C’est un devoir de mémoire » dira pour sa part Guy Zongo, fils de Norbert Zongo. Aubin Zongo, frère du disparu, était porteur d’un message de remerciement de la part de la maman. « Les guignols ont décidé de faire de ce qu’ils veulent de la vie de Norbert. Ce qui est sûr, que ce soit avec des Compaoré ou (autres) la lumière jaillira » a dit Aubin Zongo. Halidou Ouédraogo, malgré son état de santé n’a pas manqué  au rendez-vous. « Norbert est un héros. Si je ne trompe pas de mots, il est devenu immortel. Il faut qu’on sache un jour pourquoi ses assassins l’ont criblé de balles, l’ont arrosé d’essence, d’alcool. Que la mort de Norbert Zongo ne soit pas un vain sacrifice » a dit Me Ouédraogo.


Basidou KINDA

 



23/12/2012
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